La France a peur ...c'est avec sa voix grave que Roger Gicquel nous annonçait, avec sa mine de chien battu, que l'hexagone était terrorisé par les tueurs d'enfants, après l'arrestation de Patrick Henry, assassin du petit Philippe Bertrand.
Je suis un enfant de la TV comme d'autres furent des fils de la radio, et les émissions des années 70 résonnent encore dans mon imaginaire d'adulte qui n'a pas oublié son enfance. Les Visiteurs du Mercredi, avec Patrick Sabatier et l'oubliée Soizic Corne,
Brok et Schnok, gentils extra-terrestres poussant la chansonnette,
l'annulaire érectile des Envahisseurs, traqués par David Vincent, qui s'était perdu sur une route de campagne,
une nuit, le nain diabolique Miguelito Loveless, savant fou ricanant, maître du monde de pacotille, qui jouait des tours facétieux à James West et Artemus Gordon,
Mehdi qui n'avait d'yeux que pour Belle,
un gentleman cambrioleur qui détroussait les riches veuves,
ou Alain Jérôme qui nous présentait les Dossiers de l'Ecran, avec sa mine grave sur un générique solennel ...
Autre temps, autre petit écran ! 3 chaînes publiques, le célèbre carré blanc qui classait Angélique, la belle Marquise des Anges,
dans la catégorie, film interdit aux enfants et les westerns du mardi soir, avec un John Wayne qui arrivait toujours à temps !
Aujourd'hui les chaînes se sont multipliées comme les petits pains, et le choix donne plutôt une impression agréable et permet d'éviter de se taper la fameuse grille figée durant les mouvements de grève d'antan ! Abondance de biens ne nuit pas,la diversité est, enfin de compte, une bonne chose, notamment au niveau de l'information.
Mais la multiplication des chaînes a banalisé le phénomène télévisuel, et le statut quasi magique de la petite lucarne avant les années 80, a disparu. Les images, dupliquées à l'infini, dans toutes les pièces de la maison, étant notre pain quotidien, sont passées d'icônes religieusement regardées à un flux continu d'informations distraitement perçu. De la rareté à l'abondance, c'est plutôt le deuxième état, que je préfère, mais il n'en reste pas moins que je suis nostalgique de cette télé d'antan, certainement car elle est liée à mon enfance, et que, comme disait Rousseau dans L'Emile, les goûts enfantins vous marquent pour la vie !
La France a peur, murmure le regretté Roger Gicquel, en ouverture du Journal Télévisé de TF1 sur un ton théâtral ... passage assez hallucinant qui joue à fond sur l'émotion et les réflexes sécuritaires, qui, aujourd'hui, ferait certainement scandale ...comme quoi, le traitement de l'information, n'en déplaise à certains, c'est nettement amélioré depuis 30 ans !